samedi 31 mai 2014

Calimarine

Depuis trois ans mon monde s'est enrobé d’obscurité, de flou, et de nuages
Je heurte les objets, renverse le vin, des bouchées de nourriture atterrissent à côté.  Je peine à ranger ma maison, à circuler parmi les gens...
Je ne m'habitue pas à cette vision monoculaire, à la perte du champ périphérique.
C'est extrêmement fatiguant, jour après jour, heure après heure, minute après minute, de faire l'effort de voir et je me sens plonger dans la déprime

Au début j'avais un courage pas possible, sure que les choses allaient s’arranger, que j'allais me faire à mon handicap, que je continuerais à vivre comme avant, et même mieux qu'avant!
Presque trois ans plus tard, ce n'est pas ce qui se passe hélas, je suis dans la phase déprime. Je dois décevoir bien des gens qui autrefois venaient chercher de l'optimisme dans mes petites Paroles
Désolée de n'être que moi, quelqu'un qui aujourd'hui peine et perd courage
Pourtant je continue à chercher des pistes pour m'en sortir

Je cherche sur le Net des articles sur le cerveau et je lis son incroyable capacité à s’adapter aux situations nouvelles, je cherche des trucs et ficelles, je m'informe pour savoir comment font les gens dans mon cas
Apparemment au bout de quelques mois de tâtonnement ils se débrouillent très bien avec un seul oeil!
Ce qui n'est pas (encore) mon cas...

Alors... que se passe-t-il pour moi et en moi? 
Comment faire pour m'habituer enfin à cette vision tronquée que mes lunettes, pourtant bien grandes, ne parviennent pas à affronter, afin de rendre la réalité plus nette, plus facile d'accès?

J'ai de la chance, me dis je dix fois par jour: je ne suis pas devenue aveugle, et jusqu'à présent le traitement d'enfer que j'ai reçu (et reçois encore) au quotidien me permet de sauver l'oeil rescapé
Je vois donc et quand les objets sont bien cadrés, bien éclairés (mais pas trop, sinon c'est l'éblouissement): c'est ainsi que je peux lire sans trop de problème, me débrouiller idem à l'ordinateur
C'est sortir du cadre qui me complique les choses, m’aventurer dehors et surtout quand le soir tombe... je ne distingue plus rien alors et... j'angoisse

Mon corps aussi a beaucoup vieilli avec la prise des médicaments et l'avancée en âge n'arrange pas les choses..

Voilà c'était mon quart d'heure  de Calimarine ;-)

mardi 27 mai 2014

la plasticité du cerveau

Le commentaire de kéa sur mon billet précédent me confirme ce que j'ai mis un certain temps à réaliser
Il y a autant d'artérites temporales que de personnes qui en sont atteintes!-

- chez certains les douleurs du haut du corps (pas que la tête, mais aussi la mâchoire, les épaules).. sont vives, insupportables et ne cèdent pas ou peu aux antidouleurs

- chez d'autres l'atteinte est légère et cède avec quelques grammes de cortisone pendant un temps assez court

- d'autres ont eu la chance d'être diagnostiqués assez vite et s'en sont sortis rapidement

- enfin, certains ont une" après maladie" sans alertes ni rechutes. La maladie suit son cours et s'oriente paisiblement vers sa fin, càd l'abandon de la cortisone

J'ai eu les douleurs temporales,( j'en ai parlé sur mon blog principal au début août 2011), les mettant sur le compte d'une fatigue oculaire provoquée par l'abus(!) de l'ordinateur

J'ai eu une atteinte parmi les plus sévères, avec perte rapide et irréversible d'un oeil. le médecin vu la semaine dernière me l'a confirmé, maintenant que je suis en mesure d'entendre cela calmement (jamais on ne m'a dit ça au début évidemment et c'est tant mieux!)

J'ai réagi douloureusement à la prise massive de la cortisone que mon corps refusait, au point qu'il a fallu ajouter un autre médicament difficile à supporter aussi

La convalescence est lente et chaotique, avec rechutes que j'espère chaque fois temporaires mais qui me font peur bien sûr: quand je vois la rapidité avec laquelle l'oeil gauche est mort, je crains toute alerte

Bref ce fut pour moi un parcours douloureux, et qui me suivra....

Ma difficulté principale aujourd’hui est de me restreindre trop dans des activités que je pourrais recommencer à envisager. 
Par ex conduire. J'ai recommencé avec parcimonie pour des itinéraires courts et que je connais parfaitement. Mais j'ai concrètement peur par ex de devoir me garer du côté gauche (non voyant). 
Alors plutôt que de parier sur la chance de trouver un endroit facile pour me garer, je préfère renoncer à sortir, je reste chez moi
Ce soir dans la ville universitaire proche, il y a une rencontre avec un auteur que j'apprécie: il parlera de son dernier roman. Justement cela m'intéresse fort car le dénouement de ce roman m'intrigue.Mais il faut s'aventurer dans des parkings en sous sol, autant dire dans des catacombes
Je crois que je ne suis pas très courageuse. Je constate aussi que j'ai perdu beaucoup de mon humour...

Un ami médecin me parlait l'autre jour de la plasticité du cerveau capable de s’habituer à n'importe quelle situation nouvelle. Je crois que je n'y crois pas assez en ce qui me concerne...

dimanche 18 mai 2014

Humilité

Je continue ma réflexion sur médicaments/pas médicaments

Autrefois j'ai souffert de lumbagos fort douloureux
Autrefois j'ai aussi souffert de troubles anxieux assez pénibles
Et c'était en  même temps que mes enfants ado demandaient du temps et de l'attention. J'ai mordu sur ma chique

J'ai parlé de ma phobie des médicaments: j'ai donc résisté un maximum à prendre quoi que ce soit
Oui à l'acupuncture qui ne m'aidait pas plus que ça
Oui aussi à un cheminement intérieur qui au bout de mois et de mois de douleurs, m'a soulagée de l'essentiel.
Cheminement intérieur et solitaire fait de lectures diverses, de réflexions/méditations, et surtout une pratique d'une respiration ample et détendue dans le ventre... De m'en être sortie seule après dix ans de souffrances et de découragement m'a persuadée que c'était possible et je regardais avec une certaine compassion méprisante ceux qui s'enfermaient dans des médications éternelles


A la veille de choper l'artérite temporale donc, je me sentais bien,et très  fière de m'être sortie de mes maux

Puis vint Horton et sa dévastation dans mon corps et mes yeux

Cette fois je n'avais pas le choix: je DEVAIS prendre des doses très fortes de cortisone. Et pas que, d'autres trucs que je considérais comme des poisons et que je prenais du bout des dents

J'ai vécu cela  comme de l'humiliation, j'avais échoué, je devais me soumettre

La dernière alerte m'a mise à terre, physiquement bien sûr, mais surtout moralement
La maladie est plus forte que mon orgueil : non je n'ai pas de prise absolue sur ce qu'il m'arrive et oui, il me faut reconnaître avec humilité que j'ai besoin désormais et pour toujours de mes comprimés de cortisone, et que je peux être reconnaissante qu'ils soient là pour m'aider

Hier j'ai eu à ce sujet un échange avec une de mes filles
Elle souffre depuis quelques mois d'un acouphène qui l'empêche de dormir et lui rend la vie vraiment difficile
Comme cela ne passait pas, elle a consulté un spécialiste, qui dans un premier temps lui a conseillé de se détendre et de ne pas "écouter" son acouphène
Conseil facile à formuler, difficile à suivre alors qu'il envahissait tout le champ dans sa tête, surtout la nuit
Elle a re-consulté et ce médecin lui a donné un médicament qui l'aide beaucoup, sans supprimer complètement le bruit infernal
Elle est beaucoup mieux dans sa peau, et cela se voit, moins irritable, moins fatiguée...

Elle n'a  pas hésité longtemps avant de prendre les moyens qui s’imposaient
Par contre elle m'a dit que ce problème de santé lui demandait de creuser plus profond pour mettre le doigt sur ce qui ne va pas... ce qu'elle a commencé à faire

mercredi 14 mai 2014

elle en prenait tous les jours... un ou deux

oui vous avez raison
c'est un "rêve", une sorte de fantasme irréaliste  de pouvoir vivre sans médicaments

Et j'ai dû en prendre évidemment, comme tout le monde...bien avant mon accident de santé!

Mais j'ai toujours veillé à limiter les médicaments un max...
(J'avais un ami qui pour un rien prenait des antibiotiques, prescrit pas son ami pharmacien
Et les antibio ne lui faisant plus aucun effet, il les abandonnait 
Il avait des collections de médicaments entamés et jamais achevés)

Je sais très bien pourquoi je résiste à la prise de médicaments, alors même que je sais que la cortisone me permet de ne pas devenir aveugle :

Ma mère a carburé toute sa vie aux médicaments! 
Je l'ai vue jour après jour remplir son verre d'un peu d'eau, ouvrir sa boite d'antidouleurs et avaler son comprimé quotidien. Puis, souvent un autre plus tard...
Elle leur demandait l'impossible au fond... de la délivrer de ses maux de crâne, qui étaient surtout des maux de vivre

Plus tard quand elle était dans sa maison de retraite, elle suppliait l'aide soignante de lui donner sa dose.
Cela ne lui suffisait pas. Elle me suppliait de lui acheter un autre boite de comprimés...

Parfois durant le WE! Alors je devais aller à la recherche d'une pharmacie de garde pour la satisfaire.  J'ai résisté, puis pas facilité j'ai cédé

Adolescente donc et adulte je me suis forgée cette conviction profonde: PAS ou le moins possible de médicaments. Le pédiatre de mes enfants heureusement ne les prescrivait qu'en cas d'extrême nécessité. Je lui en suis reconnaissant!

Alors quand depuis trois ans je suis obligée de prendre des médicaments... j'ai l'impression que je me trahis, que je cède à la facilité, que je devrais me secouer...

Oui, je sais bien que je n'ai pas le choix, mais c'est inscrit profondément en moi


lundi 12 mai 2014

imbibée ou les maux du sevrage

Au commencement de l'artérite temporale, j'ai reçu des doses inimaginables de cortisone
1000 mg par jour pendant une semaine!
C'est énorme!
Il m'a fallu affronter  - la maladie qui s'est abattue sans crier gare,
- les malaises dus à cet apport inouï de cortisone,
- et la perte de mon oeil
Ce sont les malaises qui m'ont le plus affectée, encore maintenant
En deux ans et demi j'ai lentement pu baisser les doses
Jusqu'à me voir sevrée complètement il y a trois mois
Ce que je pensais une libération a montré ses côtés pervers auxquels je ne m'attendais pas: le sevrage était  lui aussi un parcours de combattant: faiblesse musculaire, mal à toutes les articulations,  coeur qui bat en déroute, perte de connaissance

Deux mois comme ça et puis survient l'alerte (elles ont parsemé mon parcours) avec la montée de la CRP (taux d’inflammation dans le sang)
Après avoir écarté les causes possibles, le médecin se rend à l'évidence: je suis en train de faire une rechute de l'artérite temporale, j'en ai parlé ici

Donc pas le choix je dois reprendre une dose "raisonnable" de cortisone

Et là... miracle, tous les maux du sevrage disparaissent comme par enchantement! voilà que je retrouve un bien-être physique dont j'avais oublié jusqu'au souvenir!
Je n'en reviens pas...je n'ose y croire

Dans 15 jours  on fera un bilan. Plus j'avance, plus je suis persuadée que mon corps a tellement été imbibé de cortisone, qu'il ne peut plus s'en passer. Je suis condamnée à devoir en prendre une certaine dose (qu'il faudra trouver) pour aller simplement bien, pour pouvoir affronter sans trop de problèmes mon  quotidien

Alors qu'il y a un an, j'espérais pouvoir ENFIN être quitte de ce médicament que j'accusais de tous mes maux, aujourd'hui, je reconnais humblement en avoir besoin, Je suis en quelque sorte "droguée", dépendante

Peut-être y a-t-il un cheminement à faire pour arriver à m'en passer, mais je n'y crois plus trop
(Après tout, plein de gens prennent pour le reste de leur vie un médicament pour le coeur (ou autre chose)
Oui peut-être ai-je encore un cheminement à faire pour être capable de dépasser l'aspect médicaments et aller à plus profond, à plus essentiel



mercredi 7 mai 2014

Remise en question

Hier, un peu secouée par un échange et un mail reçu de la blogosphère
A la suite de quoi je me pose cette question:

est-ce que je m'enferme dans un cocon rassurant, n'osant plus vivre, prendre des risques contrôlés?
est-ce que j'aurais besoin qu'on me botte le cul? qu'on me secoue les puces?
par exemple, serait-il possible pour moi, d'affronter la foule samedi prochain pour participer à cette fête de rue (la zinneke) que les autres années,  je n'aurais ratée pour rien au monde?

Qu'est-ce que je ne fais pas et que je pourrais (devrais) faire?
A quoi est-ce que je renonce alors que je pourrais mordre sur ma chique tout en prenant les précautions nécessaires?
Est-ce que je me coince confortablement derrière mon handicap pour me donner de bonnes excuses pour ne pas agir? et tout simplement vivre?

Je n'ai jamais été une audacieuse dans le domaine physique (voyages dans les pays lointains, randonnées un peu exigeantes...)
Je le suis par contre dans d'autres domaines: prise de parole en public par exemple. Là, je me sens à l'aise, sans trop de peur, juste la pointe d'adrénaline nécessaire pour donner le meilleur de moi-même

Mais pour ce faire, je suis en sécurité dans des lieux qui ne sont pas "dangereux" pour moi (pavés, marches invisibles, obstacles surgissant sur la gauche...)

La seule personne qui peut répondre à ces questions c'est moi!

Ce que je sais en tout cas, c'est que j'ai voulu ouvrir un endroit (ce blog) où il serait possible d'échanger sur l'artérite temporale, et si possible, susciter des échanges avec des personnes qui viendraient ici, guidées par les moteurs de recherche...
Et pourquoi pas? créer un mini forum... avec, si la sauce prend, interview de spécialistes

Il faudrait pour ça sortir de l'ombre, et annoncer, tant sur mon blog que sur FB l’existence de ce blog! 

Ce qui me gêne (et découragerait les lecteurs, j'imagine), c'est que cela m'étonnerait que mon écriture ici soit "légère et court vêtue"...j'ai hélas perdu beaucoup de ma faculté à écrire dans l'humour

merci à ces deux personnes qui m'obligent (m'invitent plutôt) à aller plus loin!

mardi 6 mai 2014

Rassurer le coeur

Rappel pour ceux qui arrivent ici par hasard
J'ai ouvert ce blog Coumarine2 pour regrouper ici tous les billets qui ont trait à Horton...

Est-ce que les médecins suivent une formation à l'écoute?
Franchement ça m'étonnerait...
Ils suivent c'est évident, une formation à l'efficacité, au rendement...

Ce matin contrôle approfondi de l'oeil rescapé, celui qui me permet encore de voir et de savourer la vie, le monde changeant et coloré
Et comme toujours depuis le début de mon aventure, je suis reçue par le grand professeur, spécialiste de ma pathologie, cette chère maladie de Horton!
Un coup d'oeil sur mon dossier médical interne de la clinique, lui a appris l'alerte dont j'ai souffert il y a un petit mois : il s'agissait donc d'examiner à fond mon oeil  et de voir s'il n'avait pas subi de dommage...

Non! tout semble normal...
Rassurée je me risque à lui parler de mes problèmes connexes mais qui néanmoins sont les miens chaque jour
- je m'habitue mal à mes lunettes en vision progressive, j'ai toujours l'impression de voir flou, et donc de ne pas pouvoir percevoir les "dangers" de la rue, du métro etc
- j'ai des petits problèmes d'équilibre
(Je ne lui parle pas de difficultés liées à la prise de cortisone... c'est le médecin de médecine interne qui s'en occupe: il me faut sérier les problèmes selon la consultation à laquelle je me rends ;-))

Tout ça ne lui semble pas important ; elle le balaie d'un geste un peu impatient. Ça fait partie de l’ordinaire de la maladie (ben tiens!)
Ma vue n'a pas pâti de l'inflammation détectée par la hausse de la CRP il y a un mois, je devrais être contente non?
Pour le reste oui, évidemment, faut savoir que... ben c'est comme ça, faut s'habituer... (c'est tout juste si elle me dit pas, allons un peu de courage, ne faites pas tant de manières...)

Et hop! au revoir madame à dans un mois pour le contrôle suivant!

Et je repars perplexe, rassurée, mais sans l'être vraiment
Ma tête est rassurée, celle qui pense, rationalise
Mais mon coeur est frustré
Ma tête est rassurée parce que il n'y a pas de dommages

Mais une écoute bienveillante et attentive m'aurait fait le plus grand bien.
Après tout, je ne peux parler de mes problèmes de vue, si prégnants que une fois par mois... au rythme des contrôles...

Ensuite je dois me débrouiller seule avec mes petites difficultés, puisant dans mon courage qui s'épuise parfois, la force de continuer avec sérénité

Je dois bien me dire que JAMAIS cela ne s'améliorera... faut juste veiller à ce que cela ne s'empire pas

Je crois qu'à certains moments j'aurais besoin d'une maman qui me prendrait dans ses bras, qui me caresserait la tête, et me bercerait doucement.

C'est cela que j'aimerais dire et redire aux jeunes médecins: vous soignez les corps, très bien... mais dans les corps souffrants il y a des cœurs qui ont faim de compréhension, d'écoute, de partage
Et vous verrez combien ces corps que vous soignez iront mieux si vous prenez en compte les ressentis de la personne dont parfois elles n'osent pas parler..

Là ce matin, je me donne du courage toute seule, un peu la méthode Coué...;-))

samedi 3 mai 2014

Renvoyée à une autre vision

Je fais parfois cette expérience
l'oeil qui voit, fermé et bien fermé, ne laisse passer aucun filament de lumière
l'oeil aveugle est lui, grand ouvert...
Et il regarde de tout son coeur (oui! c'est le coeur qui va compter dans ce que je raconte)
 Et voilà que je fais des efforts pour traverser l'ombre, le noir...
Je cligne de l'oeil, je m'obstine, le taxant d'indocile
Puis je me calme, et ... j'ouvre vraiment l'oeil, qui me renvoie à un écran noir, si noir!

Celui-ci est traversé de fulgurances... comment dire, des fulgurances projetées comme sur un écran
Parfois c'est joli, il y a des spirales ou des graffitis qui s'affichent sur l'écran au fond sombre de cette vision qui s'affole un peu

Au bout d'un moment, bloqué par un mur infranchissable, il n'a d'autre recours que de repartir vers l'intérieur, vers les pulsations de  mon être profond. Et je me mets alors à l'écouter avec grande attention!
Cet oeil-là je vous le dis, devine des choses que l'autre qui voit n'aurait jamais soupçonnées

Je ne dis pas que c'est confortable, il n'est pas facile d'affronter le noir absolu
La peur est là, présente, envahissante. La peur du vide qui renvoie à la peur de ne plus être rien!

Mais il ne s'agit pas d’avancer, il s'agit de rester immobile
immobile et attentive... pour essayer de capter ce qui s'offre à moi...
 car je devine que je vais avoir accès à l'inattendu, aux secrets...
quels secrets? des secrets intenses qui me parlent déjà, qui me remuent

Je vois sans voir, c'est curieux, je suis renvoyée à une autre vision
Une vision qui m'ouvre à des espaces insoupçonnés, pas faciles à pénétrer, mais je crois qu'il me faut les explorer
Cet oeil est tourné vers les pulsations de mon coeur
De ma vie
Il y a quelque chose je crois qui m'attend au tournant! 

vendredi 2 mai 2014

Redevenir moi-même

Pourquoi ce stress intense (cette peur) dès que je "sors" là où il y a du monde?
Je m'oblige à sortir pourtant, à continuer à fréquenter le monde extérieur
Mais cela me coûte et je rentre épuisée

Je m'y oblige, pour ne pas rétrécir
C'est sûr que dans mon bureau, ma maison en général ou lors de mes petites promenades dans le parc proche, je me protège de ce stress qui m'étreint dès que je quitte ma zone de confort, mes endroits connus et que je sais sans danger

Alors je me dis et me répète lentement:
Ce qui t'est arrivé n'est pas si grave que ça! Tu as encore un oeil, et si ton corps peine sous les effets de la cortisone, au moins tu peux marcher, te déplacer...
Tu aurais pu devenir aveugle, tu pourrais te retrouver dans un fauteuil roulant, ou souffrir d'un cancer grave

Donc
- apprécier ce que j'ai, rester dans la gratitude, savourer la vie, chaque instant de vie
- veiller à ne pas me rétrécir, à ne pas m'amputer en évitant systématiquement les activités qui me posent problème, rester dans la vie, au maximum de ce que je peux être et faire
- accepter que les choses ont changé, que j'ai perdu beaucoup de mes possibilités et donc de mon autonomie

Aujourd'hui, j'ai senti que je me laissais déborder par le stress... je me sentais mal, mon coeur s'affolait: je crois que j'aurais pu perdre connaissance
Alors, je me suis arrêtée, me suis assise un petit moment
J'ai respiré calmement, j'ai tenté de reprendre possession de moi-même

J'ai quitté un instant cette zone affolante du mouvement et du bruit, pour recontacter mon être intérieur profond 
Là où je peux me redéployer et redevenir moi-même







jeudi 1 mai 2014

30' maximum!

j'écrirai ici ce que je ne veux plus mettre sur mon blog principal
pour ne pas lasser
personne n'aime entendre parler de la maladie, surtout quand elle confronte à des choses pas si agréables
Mais moi j'ai besoin d’écrire à ce sujet
Même si je n'ai pas de lecteurs ici

Ce matin, comme chaque jour de congé, l'Homme est parti marcher
Il aime ça, ça lui fait du bien et je me réjouis pour lui
Je m'imagine respirer les beaux paysages qu'il va rencontrer au hasard de sa route

Mais moi, je n'accompagnerai pas
Incapable de marcher plus d'une demi-heure, surtout d'un bon pas
Alors ça fait trois ans bientôt que j'ai renoncé à aller avec lui et son petit groupe de marcheurs

Je reste ici, dans mon petit bureau, je me protège de la lumière qui me blesse l’oeil
Ce n'est pas toujours facile
Surtout quand comme hier, il m'a reproché de ne pas "faire d'effort"
Oui, je sais, ses mots ont dépassé sa pensée, il ne croit pas vraiment ce qu'il dit, d'ailleurs ce matin il s'est excusé
Mais c'est dur...

Tout à l'heure j'irai faire une petite promenade pas loin de chez moi.... 30' maximum